Défilés Haute Couture : un bilan entre rêves et contraintes
Defiles | Publié le 13/07/2009 09:10:38
Les trois jours consacrés à la haute couture en début de semaine dernière se seront déroulés dans un cadre bien spécifique et une nouvelle ère semble voir le jour. Dans un contexte économique inédit et délicat, la haute couture ne peut plus faire la sourde oreille aux contraintes économiques. Si elle ne peut faire de gros bénéfices, la haute couture se doit maintenant de ne plus perdre de l’argent, les mécènes n’ont plus les moyens de financer des collections où le luxe et l’abondance. Les Maisons « rentables » se comptent sur les doigts d’une main. La fédération de la haute couture comptait 24 griffes ou marques en 1987 elles ne sont plus que 11 aujourd’hui pour cette session consacrée à l’automne hiver 2009-2010. Plus incroyable encore il y avait 106 « maisons » haute couture après la seconde guerre mondiale. Les critères liés à l’appellation haute Couture sont contraignants et peu de marques peuvent se permettre de les suivre aujourd'hui : modèle exclusif, savoir-faire, travail à la main etc … Une collection haute couture peut très rapidement engloutir des millions mais les chiffres restent souvent secrets. Les grandes marques se servent de la haute couture comme vecteur d’images pour développer des lignes accessoires et de la parfumerie, rares secteurs apportant du chiffre d’affaire. Adeline André, Anne-Valérie Hash, Chanel, Christian Dior, Maurizio Galante, Jean-Paul Gaultier, Givenchy, Christian Lacroix, Dominique Sirop, Franck Sorbier et Stéphane Rolland, sont les derniers à être « Membres haute couture » . Parmi eux Anne-Valérie Hash et Maurizio Galante n’ont pas défilé, Franck Sorbier a présenté quelques pièces dans un appartement et on connaît la situation dramatique de Christian Lacroix dont la maison est en liquidation judiciaire et son avenir plus qu’incertain.
Un business de la haute couture très limité
Les marques n’ont plus le choix de développer en parallèle des lignes de prêt à porter haut de gamme afin de bonifier ces lignes « couture ». D’ailleurs le jeune créateur Christophe Josse se lance lui aussi dans le prêt à porter (lire notre interview) même si il affirme que cela n’est pas pour des raisons économiques, on devine à mots couverts qu’il n’a pas le choix. Pour Dior ou Chanel, les collections haute couture sont l’antichambre des modèles de prêt à porter qui sont beaucoup plus accessibles à une clientèle plus large. C’est pourquoi les collections de la saison présentée sont cette année beaucoup plus proche du prêt à porter. Moins excentriques, voir moins créatives, moins luxueuses, elles donnent une nouvelle image aux marques. Moins élitistes, plus proches des clientes et du public, les collections de cette année sont très sobres.
Une fois de plus chez Dior et Chanel on aura mis les grands moyens pour des collections qui n’auront pas retournées les foules présentes pour ces shows haute couture. Chez Dior on joue sur le côté sexy, glamour, et sur les jeux de transparences, mais on ne comprend pas où John Galliano veut en venir. Un modèle vêtue d’un simple soutien gorge et d’une robe longue sonne faux et déstabilise. Les sous-vêtements s’affichent, le créateur aurait-il oublié le climat de l’hiver. Plongé dans les archives Dior, John Galliano nous perd un peu, beaucoup, passionnément ….
Chez Chanel, Karl Lagerfeld ne fait pas dans la demi-mesure, avec plus de 70 modèles, le couturier propose une nouvelle fois une collection riche, dense et .. magnifique. Il y en a pour tous les goûts, du sobre au plus riche, du simple au plus structuré, forcément vous trouverez la robe de vos rêves. Gaultier aura fait son cinéma, comme d’habitude me diriez-vous, non cette fois-ci il rend hommage au 7ème art et c’est parfaitement maîtrisé, les modèles sont remarquables. Les membres correspondants que sont Elie Saab et Giorgio Armani auront une fois de plus séduits les parisiennes. Le libanais tout en sobriété et élégance avec une collection totalement blanche apportant un nouveau regard sur le couturier. Rigueur et élégance sont au rendez-vous du défilé Armani Privé, Giorgio Armani l’ami des stars réitère son style dans des variantes de noir, une collection réussie mais sans surprises.
Dans l’ensemble on aura vu des collections faisant la part belle aux savoir-faire, aux détails au travail des coupes plus qu’à l’abondance des modèles, des matières et du luxe. Les créateurs se sont recentrés sur l’essentiel : la création pure en maîtrisant les coûts. Place à l’intelligence de la création. La Femme est la vedette et le centre d’intérêt, comme toujours, non encore plus cette saison. Le vêtement se met au service du corps et non l’inverse comme cela fût souvent le cas par le passé dans la haute couture. La silhouette est la préoccupation majeure, qu’elle soit élancée, stylisée, travaillée. Les basiques sont là, la femme est ultra-féminine, glamour, tout en élégance, comme on l’aime.
On sent que l’économie du secteur, la fragilité des marques impose de nouvelles contraintes. Malgré tout, la haute couture se bat et défend sa raison d’être. Pour beaucoup elle est indispensable. Les leaders Dior et Chanel affirme que les commandes progressent. Pourtant peu de femmes peuvent s’offrir une robe haute couture dont les prix peuvent aller de 10 000 euros à des centaines de milliers. Les clientes existent mais leur façon de consommer la mode évolue, du Golfe aux anciens pays de l’Est en passant par l’Asie, les besoins et attentes ne sont plus les mêmes. Toutefois, la haute couture se doit de poursuivre pour l’image des marques mais aussi pour l’image de la France, leader dans ce domaine, la haute couture étant une exception et une appellation française, elle se doit aussi d’exister pour permettre à de petites entreprises artisanales de vivre. Plus encore elle nous apporte du rêve et ça on ne peut lui donner un prix.
Par MJK
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