L’homme est-il l’avenir du luxe ?

Luxe | Publié le 23/03/2009 07:52:27
A l’heure où les marques de luxe connaissent une situation économique quasiment inédite pour la plupart, de nombreuses questions alimentent ce secteur qui cherche à maintenir une progression significative.
Le marché du luxe a été estimé à 130 milliards en 2007 avec une croissance qui oscille autour de 10% depuis 4 ans, avec ces chiffres ce secteur semble bien armé pour affronter la crise en 2009 et peut donc se permettre de passer une année difficile cependant les exigences financières des groupes de Luxe (LVMH, Richemont, PPR Gucci Group, Hermès, Chanel, Permina, OTB (Only the Brave), L’Oréal, Lancaster Group, Prada, Versace, Giorgio Armani, Estée Lauder Group etc …) sont elles bien réelles.

En quête de nouveaux territoires

La prospection de marchés émergents et de nouveaux territoires est l’une des réponses mais sur des pays plus anciens comme l’Europe ou les Etats-Unis, les marques vont devoir faire preuve d’innovations, de créativités et repenser leurs stratégies. C’est dans cette optique que beaucoup s’interroge de savoir si l’Homme ne pourrait pas être le moteur pour maintenir cette croissance.
Un homme très convoité puisque au début des années 2000 c’est la cosmétologie qui s’est intéressé à lui annonçant que ce dernier devait enfin s'occuper de son aspect et entretenir son image. Une tentative plus que mitiger puisque aujourd’hui la beauté masculine ne représente que 5% des ventes de ce secteur. Pourtant les plus grandes marques se sont lancées sur ce créneau : Lancôme Men, Biotherm Men, Nickel, Givenchy Man, Men Expert ... Il faut dire que les attentes des hommes en matière de soins sont bien différentes de celles des femmes compliquant l’approche de ce marché.
Les grands parfumeurs ont déjà modifié leurs différentes stratégies pour séduire les hommes mais aussi les femmes car il ne faut pas oublier que ce sont-elle qui achètent pour l’homme encore aujourd'hui même si cette tendance évolue.

Des hommes représentant un idéal masculin

Aujourd’hui en matière de communication on ne mise plus sur de superbes mannequins posant lascivement au bord d’une piscine pour signifier le rêve et susciter le désir d’acheter. Les marques préfèrent illustrer et associer leur produit à des hommes représentant un idéal masculin : Justin Timberlake pour Givenchy, Vincent Cassel pour Yves Saint Laurent ou bien encore Rafael Nadal pour Lanvin et Patrick Dempsey pour l’Oréal Paris. Des égéries venues d’univers très différents, du cinéma à la musique en passant par le sport et la télévision, permettant ainsi de toucher un public très large à la fois féminin et masculin. Des égéries qui font vendre de plus en plus et en particulier dans des pays émergents. Elles sont présentes dans 24% des publicités en Inde et 45% à Taiwan. Aux marques de choisir au mieux l’égérie qui représentera l’image du produit mais aussi la cible visée.

 

Le luxe dans son ensemble souhaite attirer ce nouveau client que pourrait-être l’homme. L’homme devient de plus en plus autonome dans ses comportements d’achats, il a atteint une certaine maturité. L’homme a évolué et n’hésite plus à se faire plaisir, l’achat n’est plus pratique ou utile, il peut être un achat plaisir et très individualiste. Le luxe étant par définition un concentré de plaisir, une sorte de récompense que l’on s’accorde personnellement, il a donc un rôle majeur à jouer dans cette émancipation consumériste masculine. Si les marques avaient tendance depuis 2005 à s’adresser au « mass market » avec des campagnes de publicité omniprésentes, du co-branding, elles semblent depuis quelques mois se recentrer sur ses codes fondateurs à savoir l’exclusivité, la sélectivité et la discrétion afin de conserver et séduire une clientèle élitiste. Des valeurs qui confortent les attentes des hommes en matière de luxe. Un client difficile appréciant qu’on s’occupe de lui comme si il était le seul client. Un client qui souhaite être en avance et non être le suiveur. Une idée du luxe illustrée par les propos de la sociologue du luxe Elyette Roux : « Le luxe ce n’est pas la mode. Le luxe, ce n’est pas la tendance, c’est ce qui reste lorsque la tendance est passée. La marque de luxe ne doit pas suivre une tendance mais c’est à elle de créer la tendance. »
Le poids économique de la clientèle masculine est en pleine progression et représente un véritable enjeu pour de nombreuses marques, encore faut-il proposer des produits qui puissent l’attirer. C’est ainsi qu’en maroquinerie on a vu arriver ces derniers temps des lignes exclusives pour homme et on ne parle pas de bagagerie mais bien de maroquinerie. Voir des modèles défilés avec des sacs lors des semaines consacrées à la Mode Homme est devenu un standard. L’horlogerie, un secteur très masculin également (la montre étant un cadeau traditionnel pour l’homme) bénéficie pleinement de ce dynamisme. Pour la cosmétique, nous l’avons vu c’est plus délicat mais le prêt à porter profite quand à lui pleinement de cette tendance mais ce marché reste ultra-concurrenciel. Si de nombreuses marques proposent des lignes hommes en parallèle des lignes femmes, la distribution s’adaptent aussi à ce nouvel « eldorado » en réaménageant ces espaces de ventes ainsi de nombreux grands magasins se sont adaptés (Printemps, Galeries Lafayette …) en créant de véritables zones réservées à l’homme et des magasins multi-marques ont vu le jour.

Une clientèle plus volatile

Mais cette nouvelle clientèle a de nombreux défauts que les marques ont du mal à appréhender. Elle est très volatile pour ne pas dire volage. Elle s’attache beaucoup moins aux marques que les femmes. Le dynamisme de la demande masculine qui s’affirme comme un vrai relais de croissance doit offrir de belles perspectives aux marques de luxe, cependant ces dernières devront s’adapter à de nombreuses contraintes notamment géographique. Ces dernières années les catégories de riches et d’ultra-riches n’ont cessé de croître et les classes moyennes ont un intérêt croissant pour le luxe, là aussi un atout supplémentaire pour ces marques, toutefois cette tendance sera à confirmer avec la crise économique sur l'année 2009.
Les marques françaises sont les plus souvent citées dans le monde comme expression du luxe : Chanel, Louis Vuitton, Dior, Cartier, Hermès, sont des emblèmes de la culture française. Mais cette image est très disparate en fonction des territoires. Elles devront notamment réfléchir à leur positionnement sur le marché américain ou les marques de luxe favorites restent très différentes des autres pays (Mercedes, Lexus, Hilton, Cadillac) …

 

Ces marques devront aussi conquérir la clientèle masculine des pays émergents comme l’Inde, la Chine, la Russie, le Brésil, le Mexique, les Emirats Arabes. Des clients potentiels très différents les uns des autres, il faudra donc adapter l’offre mais aussi respecter les fondamentaux locaux, on ne s’installe pas à Bombay comme on pourrait le faire à Moscou ou Canton. Si le luxe arrive a s’adapter il est encore promis à un bel avenir et la clientèle masculine sera sans nul doute le moteur de cette nouvelle croissance. Toutefois les marques de luxe devront peut-être réfléchir dans un avenir très proche à offrir à une clientèle ultra-riche de nouveaux services afin qu’ils sentent qu’ils appartiennent à un club très fermé de privilégiés. Ce service pourrait être d’offrir du temps, le luxe ultime ?

 

Par L.L
Publicité