Rencontre avec Ayo à l'occasion de la sortie de son nouvel opus "Royal"

Culture | Publié le 10/03/2020 14:35:01
Révélée avec « Down on my knees », Ayo c’est ce grain de voix si pur et précieux qui chante avec le cœur sur l’amour, l’espoir, la joie, la foi… Le 31 janvier 2020, on a pu découvrir le nouvel album d’AYO. Rencontre avec une artiste touchante.

Parlons un peu de vous

Comment définiriez-vous votre style de musique ?
C’est difficile à définir. Je ne pense pas appartenir à une catégorie bien définie. Mais je dirais que c’est un mélange de soul, folk, reggae, et de différentes influences. Je préfère me définir comme une compositrice à part entière. Cela me parait plus juste, plus complet. On peut être qui l’on veut. Si demain je veux faire de la musique rock, je reste une compositrice si j’écris mes propres musiques et que je les interprète.

Comment êtes-vous tombée dans la musique ?
Quand je n’étais qu’une enfant, mon père jouait tout le temps de la musique car il était DJ dans les années 70. Je pense qu’il n’y a pas un seul jour où je n’ai pas entendu mon père jouer. C’est grâce à lui que je suis plongée dans la musique dès mon plus jeune âge. Ensuite c’est devenu quelque chose de beaucoup plus personnel, un outil pour m’exprimer, libérer mes pensées et les partager avec les gens.

D’où vous vient l’inspiration pour composer ?
Je dirais que la vie m’inspire. Toutes les expériences de la vie comme pour ma première chanson Down on my knees, inspirée d’une peine de cœur. Je me sentais rejetée, même si ce n’est pas un mot très agréable, c’était la réalité. J’avais 19 ans et j’ai écrit cette chanson parce que j’avais le cœur brisé. Mais je n’ai rien montré. Je prétendais aller bien. A travers cette chanson j’ai pu exprimer ce que j’avais vraiment sur le cœur. Je n’aime pas dire dans la tête parce que la musique va bien au-delà. Elle permet d’exprimer ce que l’on ressent au plus profond de son cœur, et non juste dans sa tête.
 
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Ayo

Parlons de votre nouvel album " Royal "



 ROYAL est sorti le 31 janvier dans les bacs. Cet album aurait du être une compilation de vos précédentes chansons. Pourquoi avoir changé d’avis ?
Parce que j’avais peur. Peur de faire une reprise de mes anciennes chansons, de les réinterpréter. J’’ai eu l’impression que ce n’était pas une bonne idée. Déjà parce que j’étais trop jeune pour faire cela. Et puis parce que je pense que les gens auraient eu une vision biaisée de moi. Une vision que je n’aurais pas aimée. Ils se seraient dit « oh Ayo n’a plus d’inspiration, elle surfe sur le succès de ses anciennes chansons parce que justement ce fut une réussite». Ce sont toutes ces idées qui vous viennent à l’esprit à ce moment-là. Et même si l’on n’est pas supposé se soucier de ce que les autres peuvent penser de vous, d’une manière très naturelle, on le fait tous. Même si l’on ne le veut pas. C’est pour cela que je n’ai pas voulu reprendre mes propres chansons. Par ailleurs, j’avais beaucoup de nouvelles chansons que je jugeais suffisamment intéressantes pour en faire un nouvel album.

ROYAL signifie supérieur, majestueux, au-delà de tout le reste. Quelle est la genèse de ce nouvel album ?
Dans un premier temps, je dois expliquer ce que ROYAL signifie pour moi car beaucoup de personnes peuvent l’associer au top de la soul, au top du RnB, de ceci ou cela. Mais ce n’est pas ce que j’entends par là. Ce qui est Royal pour moi, c’est Dieu. Mais pas sous sa forme théologique, parce que je voulais m’adresser à autant de personnes que possible. Ce qui n’est pas possible si on divise, on sépare. On peut le faire si on multiplie. Donc j’ai choisi le terme « royal » parce que pour moi Dieu est tout. Dieu est royal pour moi. Dieu est majestueux. Dieu est au delà de tout. Je pense sincèrement que, sans associer cette idée à une religion en particulier, à la fin de la journée, toutes nos prières peu importe notre langue ou la religion, s’adressent à une même idée. Et cette source est « royale ».

Cet album est vraiment paisible, comme un petit joyau qui nous apaise immédiatement. Toutes les chansons parlent d’amour et d’acceptation de soi. Quelle émotion vouliez-vous partager ?
Pourquoi devrions-nous écouter ce nouvel opus ?

Tout d’abord merci de dire que c’est paisible, comme un bijou. C’est un très beau compliment pour moi. C’est définitivement un bijou pour moi. Je suis très heureuse de cet album. Mais je dois dire que je n’ai pas le sentiment que c’est uniquement mon album, mais plutôt celui de mes musiciens autant que le mien, car nous l’avons créé ensemble. Je n’aurais pas pu le faire, seule, sans eux. Je n’ai pas cherché à prouver quoi
que ce soit. Mon souhait était de donner, d’échanger. J’ai le sentiment que l’on m’a offert un don et je voulais simplement remercier. Chanter pour l’univers et témoigner de ma reconnaissance. Au moment de l’enregistrement, j’étais vraiment reconnaissante parce que je sortais d’une période sombre pour moi. J’étais en dépression. Et avant de savoir ce que cela signifiait vraiment, j’avais quelques idées préconçues et lointaines à ce sujet. Maintenant que je sais que cela est réel et peut arriver à n’importe qui, même aux personnes les plus heureuses, je voulais vraiment que cet album parle d’amour, d’auto-thérapie. C’est au sujet d’espoir, de lumière, parce qu’à la fin de la journée, je pense que la seule chose dont nous avons besoin c’est tout cela. Et pour moi cela vient de Dieu. Si je devais définir Dieu, je dirais que Dieu est la lumière, l’amour, cette énergie puissante. 
Voilà, c’est l’idée que je voulais partager avec chacun : ne jamais perdre la foi, toujours voir la lumière dans nos vies. On prend nos propres décisions. On décide si on veut rester dans la pénombre ou si on veut sortir dans la lumière. Cet album s’est dessiné autour de cette idée, parce qu’à ce moment-là j’en avais moi-même besoin. Je dirais que j’étais un outil pour l’univers. Je devais apporter une touche de lueur dans la vie des gens. Avec la musique on peut faire beaucoup de choses, et guérir les peines des autres avec des mélodies en est sûrement la plus belle mission. Il y a quelque chose de magique.
Pourquoi devriez-vous écouter mon album ? Si vous avez besoin de lumière, d’espoir. Ou même si vous n’en avez pas besoin mais que vous y croyez, c’est une raison suffisante pour l’écouter. Il s’agit d’un album positif. Il donne de l’espoir, de la lumière.

Cet album parle de sérénité, d’affirmation de soi-même, de qui l’on veut être. Les mélodies sonnent comme un mélange de folk et de soul épurées. Dans quelle mesure est-il différent du précédent ?
Même si je n’ai jamais composé un album autour d’un concept prédéfini, la différence majeure est certainement ce que je ressentais au moment de l’enregistrement. Je n’ai pas essayé de prouver quoi que ce soit, je n’ai pas recherché à ce que l’on m’apprécie, je n’ai pas voulu démontrer mes capacités à jouer de la guitare (et c’est sûrement la raison pour laquelle ici je ne joue pas de guitare ou presque). Il n’y a que moi. Simplement. J’ai juste été reconnaissante et honnête. Même si je suis honnête pour toutes mes compositions. En fait, c’est une question délicate. Pour faire simple, je dirais que cet album sonne différemment pour moi, il est plus mature que tout ce que j’ai pu faire avant.

A qui est dédiée votre chanson Royal ?
La dernière chanson de mon album est dédiée à Dieu. Je pense que je dois tout à Dieu. On vient de la lumière et on retourne dans la lumière. Je pense qu’il s’agit là d’une très belle image que j’aimerais garder à l’esprit toute ma vie. On vient tous de la lumière et de l’amour. Et on devrait se battre pour la rejoindre. On devrait toujours garder en tête qu’il y a un endroit spécial, avec une énergie positive que l’on ne peut pas décrire mais qui est puissante et pleine d’amour, qui peut faire beaucoup pour vous si vous lui êtes dévoué. Ainsi Royal est dédiée à Dieu, sans le lier à aucune religion, à ce Tout-Puissant.

Le premier titre, Beautiful aux sonorités pop soul et acoustiques, et sorti en novembre dernier est un très beau message au sujet d’affirmation de soi-même, de trouver sa beauté intérieure. Cela s’inscrit dans l’actualité de notre société dirigée par les réseaux sociaux et le désir d’être qui l’on veut. Pourquoi avoir choisi de révéler cette chanson en premier ? Etait-ce une réponse à toutes ces personnes qui ont du mal à affirmer leur vrai eux ?
Ce n’était pas prévu de sortir cette chanson en premier lieu car, petite anecdote, quand j’ai eu fini d’enregistrer Beautiful, on pensait même que cette chanson serait un bonus. Mais j’ai toujours eu un sentiment particulier à propos de cette chanson. J’ai toujours pensé que c’était important que les gens entendent son message, et moi la première. Cette chanson est très importante pour moi car elle me fait penser à toutes ces fois où je ne me suis pas aimée et acceptée pour ce que je suis. Cette chanson était nécessaire. Je suis mère de 3 enfants, et j’ai une fille. C’était primordial pour moi lui dire ces mots. Je pense qu’il est de notre devoir d’apprendre à nos enfants à s’aimer, et surtout aux petites filles, dans une société dans laquelle il est difficile pour elles de grandir. Donc je pense qu’il était donc important pour moi de faire passer ce message en premier lieu.

Et vous, quelle image de vous-même avez-vous ?
J’aimerais penser que j’ai les pieds sur terre, du moins autant que je le peux. C’est compliqué de se définir soi-même. Je pense que je suis quelqu’un de très simple, ou du moins j’essaye de l’être. J’ai parcouru un long chemin je dois dire. Je dirais que j’ai muri en tant que femme car je suis davantage en paix avec moi-même, comme par exemple avec mes marques de grossesse sur mon ventre. En paix avec toutes ces choses dont j’ai pu être embarrassée en me disant que les gens me jugeraient. Je m’aime comme je suis. C’est quelque chose sur laquelle il faut continuellement travailler, mais je dirais que je suis plutôt à l’aise avec l’image que j’ai de moi-même.

Dans cet album, y at-t-il une chanson en particulier qui vous est tout particulièrement chère ?
Toutes les chansons me sont chères. Mais je dirais que Beautiful est spéciale pour toutes les raisons que j’ai pu évoquer précédemment. Et Royal est importante car elle est dédiée à cette idée de Tout-Puissant. Je pense que c’est un message puissant. 

On trouve tout de même quelques covers dans cet album. Comment les avez-vous choisis ? Que représentent pour vous ces chansons ou leurs interprètes comme les icônes Abbey Lincoln ou Lhasa ?
Je dois dire que je ne connaissais pas Lhasa et j’en étais embarrassée d’ailleurs car c’est certainement l’une des plus belles découvertes que j’ai pu faire au cours de ces dernières années. Je pense qu’elle est la Joni Mitchell de notre génération et une compositrice incroyable. La chanson Fool’s god est incroyable. Mon producteur, qui est un très bon ami de Lhasa et a de nombreuses fois collaboré avec elle, m’a demandé de reprendre sa chanson et de lui rendre hommage, de montrer au monde à quel point elle était une compositrice de génie.
Abbey Lincoln est une femme qui m’a beaucoup inspirée, que j’admire énormément, et pour qui j’ai un profond respect. Elle était une femme incroyable. Plus qu’une chanteuse, c’était une activiste des années 60 (sûrement l’une des époques les plus compliquées quand on parle d’activisme d’ailleurs). Musicalement parlant elle était si puissante, si forte. Elle était différente. Je l’adore. J’étais très heureuse et je me considère comme étant très chanceuse de l’avoir rencontrée. J’ai déjà eu la chance de reprendre l’une de ses chansons pour mon premier album. Elle était venue dans le studio en 2005.
 

" Nous sommes nés de parents
et nous ne décidons pas où nous vivons,
mais nous devrions pouvoir aller où nous le souhaitons. " 


Vous interprétez un titre en français, Né Quelque Part, une interprétation folk de la fameuse chanson de Maxime Le Forestier. Pourquoi avoir choisi cette chanson ? Que vous inspire-t-elle ?
Cette chanson m’a été présentée par mon manager. Cela faisait un moment qu’il me disait que je devais l’écouter, que je devrais la chanter. C’est devenu une évidence rapidement. Quand j’ai entendu les paroles, j’ai compris pourquoi il disait cela. Je l’ai adorée dès les premières notes. Maxime Le Forestier est un compositeur incroyable. C’est un grand monsieur. Je ne suis pas sûre qu’il mesurait le pouvoir de ses mots il y a environ 25 ans quand il a écrit cette chanson, mais elle a encore plus de signification dans notre monde d’aujourd’hui. Elle parle d’une façon très personnelle d’immigration, du sentiment d’être étranger, de venir d’un endroit sans l’avoir choisi. Nous sommes nés de parents et nous ne décidons pas où nous vivons, mais nous devrions pouvoir aller où nous le souhaitons. C’est une chanson importante car aujourd’hui si on s’intéresse de près à l’émigration, on voit par exemple qu’aux Etats-Unis, les Nigériens ont été bannis. Les Erythréens, les Tanzaniens ont été bannis. Des gens du monde entier, du Moyen-Orient ont été bannis, sans pouvoir revenir en Amérique. Ils se sont retrouvés bloqués alors qu’ils voyageaient lorsque ce décret a été décidé, sans pouvoir par la suite retrouver leurs familles. C’est terrible. C’est inconcevable en 2020. C’est pourquoi Né Quelque part est une chanson très importante vu la conjoncture actuelle. Peut-être même l’une des plus importantes si l’on s’attache au message.

Ayo
 

Sur la route à nouveau ...


Vous serez en concert partout en France dès ce mois-ci, et au Trianon à Paris le 2 avril prochain. Etes-vous pressée d’être à nouveau sur la route ?
Je ne suis pas juste pressée. Je suis impatiente et c’est difficile d’attendre, car s’il y a bien quelque chose que je n’ai pas, c’est de la patience. Je suis la personne la plus impatiente qui puisse exister sur cette terre. Donc oui je suis très heureuse d’être de retour. J’ai besoin de partager avec les gens, et la meilleure façon de le faire c’est sur scène. Je suis très reconnaissante de pouvoir le faire. C’est excitant.

Dans votre album précèdent, vous avez dédié une chanson à Paris, Paname. Que représente cette ville pour vous ?
Paris est ma ville de cœur. C’est comme si j’avais divorcé et que j’étais obligée d’y revenir. Paris est mon tout. Tout a commencé à Paris pour moi. C’est comme si cette ville m’avait adoptée. Elle a été un refuge, elle m’a donné tant de choses, tant d’amour, indescriptible avec des mots. Je lui serai toujours reconnaissante. Je ne peux même pas expliquer ce que représente cette ville pour moi tellement c’est fort.

Vous préférez jouer dans des grandes salles ou des petites salles ?
Définitivement dans les petites salles car j’aime être proche des gens, sentir qu’il y a une connexion. Dans les grandes salles, cela prend plus de temps, parfois même il faut attendre les 2-3 dernières chansons. Les gens sont trop loin de vous, c’est plus compliqué. J’aime l’intimité d’une petite salle.

Que ressentez-vous lorsque vous vous tenez prête à chanter devant tous vos fans ?
Je me sens extrêmement reconnaissante. Je me sens d’autant plus heureuse quand je regarde leur visage, leur sourire. Je me sens heureuse quand je réussis à apporter de la joie. Il n’y a rien de plus merveilleux. C’est magnifique. 

Sur les réseaux sociaux vous semblez proche de vos fans, toujours souriante, très tendre. Vous répondez toujours soigneusement à leurs commentaires sur votre page Facebook, vous partagez des moments acoustiques, des moments avec vos enfants. En quoi est-ce important pour vous d’être aussi proche de vos fans ?
Cela signifie que je les aime autant qu’ils m’aiment. Ils me donnent de leur temps, ils viennent me voir en concert, ils achètent mes albums. Le moins que je puisse faire est de leur démontrer que je tiens à eux. Je ne peux pas toujours le faire car je suis très occupée avec mes enfants et ma vie et ses hauts et ses bas. Mais je peux dire que mes fans me donnent de la force lorsque je n’en ai pas forcément. Ils m’offrent tant d’espoir, de joie quand je lis leurs commentaires. Je comprends alors pourquoi je fais cela aujourd’hui. Ce que j’aime le plus c’est qu’ils partagent leurs histoires avec moi. Si je le pouvais je passerais plus de temps avec eux pour les connaitre davantage. J’aimerais pouvoir prendre le temps de répondre à chaque message. Je le dis sincèrement. Ce sont des personnes incroyables. L’humain est une magnifique création de Dieu. Il y a tant de bonnes personnes, fortes et magnifiques. Je les aime sincèrement et je leur suis profondément reconnaissante.

 

Propos recueillis par C.D

Infos pratiques :
Concert le 2 avril au Trianon Complet
Nouvelle date le 24 novembre 2020 à la Salle Pleyel
Album "Royal" toujours disponible Label Wagram

Crédits photos : Sophie Koella
Retrouvez Ayo dans la vidéo ci-dessous :


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