Rencontre avec l'artiste et créatrice Noémie Chaillet-Piquand

JeunesCreateurs | Publié le 25/11/2019 10:02:17
A l'occasion d'une présentation à la galerie Joyce votre magazine a rencontré Noémie Chaillet-Piquand qui a lancée en 2018, à l’âge de 44 ans, sa propre marque. Créatrice, inventrice, designer et styliste de renom Noémie assume aujourd'hui son nouveau rôle d'artiste avec un style unique qu'elle développe sur des objets du quotidien enrubannés, des pièces de mobilier ébouriffées, ... Sa matière de prédilection : le bolduc de maisons de luxe. Une très belle découverte et une rencontre de celle qui font la beauté de notre métier..

I N T E R V I E W



Que signifie Nochapiq ?
Mon nom est un peu compliqué c'est Noémie Chaillet-Piquand, du coup j'ai repris ce pseudonyme que j'avais sur les réseaux. No comme Noemie, Cha comme Chailleux et Piq comme Piquand. J'ai préféré prendre un nom d'artiste, parce-que mon nom n'était pas si simple à retenir et aussi peut être pour signifier une forme de renaissance avec ce nouveau travail. C'est un peu une seconde vie et un nouveau souffle pour moi, mais cela reste la même personne Noémie et NOCHAPIQ. Cela a été un vrai cap pour moi de devenir Nochapiq et ainsi exposer mon travail, c'est un vrai changement.

Pouvez-vous nous en dire plus sur votre parcours professionnel ?
Nous allons remonter jusqu'à l'âge de 16 ans lorsque j'ai eu mon bac au rattrapage mais je l'ai quand même eu, à ce moment là je me suis orientée en premier vers le journalisme. Très vite je suis entrée dans la vie active, j'a commencé à la radio à faire des interviews puis j'ai fait de petits clips à la télévision pour Emmanuel Chain et Christine Bravo, on est dans les années 90 au tout début. Après ces deux années de journalisme je me suis orientée vers la maison Hermès qui m'a accueilli pour un stage et qui finalement m'a engagé en temps que attachée de presse. Au départ J'ai été en charge des dossiers de presse,  à l'époque tous les dossiers de presse étaient très classiques dans une pochette blanche avec une carte agrafée de manière très académique et j'ai accompagné le changement de ces dossiers de presse vers leurs évolutions en petit objet de communication collector et je me suis beaucoup amusée et c'est là que j'ai commencé à m'apercevoir que j'aimais tout ce qui était créatif, je bricolais mes maquettes avec de la colle, des cutters, des cartons, du bois et je me suis rendue compte que j'aimais me servir de mes mains et que j'aimais crée. A cette époque la maison Hermès était dirigée par Jean Luc Dumas-Hermès qui était un grand humaniste et quelqu'un de très généreux et de très ouvert. Cette personnalité m'a encouragé à lui faire des propositions de produits alors que ce n'était pas ma vocation première et ma fonction au sein de l'entreprise. Je lui ai proposé en premier une basket Hermès. A ce moment il n' y avait pas eu la révolution de Tom Ford et de toutes ces marques de luxe qui ont pris une nouvelle mode avec le panchic et l'accessibilité avec des prix abordable pour une clientèle plus large. On est en 1992 et j'ai dit à Jean-Louis que si le dieu Hermès qui a des ailes aux pieds vivait aujourd'hui quelles chaussures porterait-il ? Il porterait des baskets. Ce projet n'a pu être refusé et on a lancé la basket "Quick" qui fût la première basket du monde du luxe et elle est toujours en vente actuellement. Pour moi cela a été une vraie découverte. Imaginer un produit jusqu'à sa naissance, j'ai compris que j'avais envie de faire cela. Une envie confirmée par la création de cadeaux de  presse en édition limitée qui devenaient ensuite des produits en vente. Après 7 ans au service presse de Hermès je me suis dit  banco je vais faire un CAP pour apprendre la sellerie maroquinerie pour apprendre à travailler le cuir de mes mains et ensuite  je vois si je peux devenir styliste.  A la suite de ça j'étais en charge d'une mission inventive pour les nouveaux matériaux et les accessoires de mode pendant 8 ans chez Hermès. Ensuite j'ai fait un grand écart,  je suis allée vers la cosmétique et la grande consommation dans le groupe L'Oréal où j'ai travaillé pendant 5 ans en tant que directrice artistique de l'innovation packaging j'ai appris alors de nouvelles choses et découvert un nouvel univers, ce qui m'a beaucoup enrichi et ensuite je me suis mis à mon compte et cela depuis 4 ans et j'ai toujours comme principaux clients Hermès et L'Oréal.

Sac Birkin emballé chanel

D'où vous ai venue l'idée de votre marque ?
En mûrissant et en prenant de la distance grâce aux voyages réguliers vers New-York qui est une capitale effervescente où tout est possible, j'ai pris conscience qu'il était temps pour moi de montrer mon travail et de le partager avec les inconnus pour avoir leurs regards et le sentiment de prolonger ma quête vers le partage et la découverte de la vie de l'autre et pas seulement de son propre regard.

 

Et tout emballer vous vient d’où ?
Du hasard, de la vie, de l'instinct, il n'y avait aucune réflexion je ne me suis pas dit "emballes les objets". J'avais un petit bout de bolduc qui traînait, un couteau qui était tout près et naturellement je me suis dit, tiens essaies d'emballer l'objet, et ça m'a donné un petit couteau Dior que j'ai fait il y a trois ans et depuis j'ai laissé ce couteau pour décorer  mon étagère il ne servait plus à rien. Un jour je me suis dit pourquoi ne pas faire un couteau Hermès pour compléter ton couteau Dior ? Ensuite je suis passée à la fourchette, à la cuillère et là je me suis mis petit à petit à rentrer dans le jeu, a cherché les objets que je pourrais emballer.

 

Les meubles sont une nouvelle quête ?
Ce que je ne vous avais pas dit, c'était le mobilier qui a été  ma préoccupation première avant d'emballer les petits objets, Ce travail est très fastidieux et c'est une vraie relaxation de faire ce tissage, ce vêtement, cette seconde peau aux mobiliers notamment ceux qui sont chez moi et c'est aussi le hasard qui m'a amené à le faire avec ce goût pour les matériaux qui est essentiel chez moi et qui m'a toujours accompagné.

Mobilier Nochapik
 


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Vous emballez tout, même les croix vous n'avez pas d'interdit ?
Non, je pense qu'il faut poser les questions c'est la place de l'art et que je n'ai pas a donné les réponses, en revanche c'est le domaine de liberté où on peut s'interroger et pousser les limites du questionnement sur des sujets qui peuvent paraître tabous et qui font partis de la vie.

 

Que souhaiteriez vous que le public se posent comme question quand il regardera vos œuvres ?
J'ai envie qu'ils se posent librement des questions si il a envie de se poser des questions, qu'il s'arrête à l'aspect de l'objet si il a envie de s'arrêter à l'esthétique de l’objet, j'aime cette idée que c'est le spectateur qui va apporter les réponses, ses propres réponses aux questions que je pose et du coup il n'y a pas de bonne ou mauvaise réaction du spectateur, je cherche juste à partager mon univers et à provoquer les réactions, mais je n'ai pas de préférence sur les réactions que je provoque.

 

Pourriez vous nous éclairer sur le cap que vous avez pris en passant de L'Oréal à l'art ?
C'est le luxe justement de ne pas se poser la question, de savoir si je vais vendre où pas à la base, l'histoire nous le dira. Pour moi la démarche créative a commencé il y a 25 ans, seulement j'ai commencé à montrer il y a juste un an ce que je fais parce que j'ai eu un déclic et que j'ai ressenti que j'étais prête à partager alors qu’auparavant j'avais sûrement peur du regard d'autrui, Il s'agit de la même personne mais j'ai la chance de travailler dans un univers créatif qui me permet de m'exprimer au service des marques. J'ai passé un cap et désormais je suis émancipée de la société du monde des affaires et je suis dans une quête artistique, et j'assume aujourd'hui cette prise de risque.

 

Que pense le grand public lorsqu'il pose le regard sur votre travail ?
Il est rare que le travail que je montre n'est pas provoqué de réaction, je sens parfois des interrogations, parfois un amusement, parfois les personnes qui voient mon travail le prennent dans la main, parfois d'autres le regardent comme si c'était quelque chose de sacré, mais jamais je n'ai senti d'indifférence, c'est pour ça, ça m'a encouragé à continuer.

 

Comment vous faites pour trouver tous ces morceaux de Bolduc et ces objets ?
Je me fournie dans les magasins de consommation pour les biens courants, au marché aux puces, dans les brocantes, sur eBay, sur Leboncoin, tout y passe, j'ai toujours au coin de la tête cette quête de l'objet que je vais pouvoir emballer et qui me procurera du plaisir à le travailler et j'ai constamment l'œil qui furete aussi bien chez moi qu'à l'extérieur. Pour ce qui est de l'habillage du ruban, le bolduc théoriquement ne s'achète pas, je le trouve sur internet et les amis m'en donnent, des personnes du travail, du domaine privé. On me donne les objets et aussi du bolduc. Tout dernièrement on m'a donné un sac Kelly Hermès ( voir photo) que j' ai emballé de bolduc rose et c'est quelqu'un de mon entourage que je ne connais pas beaucoup qui a pensé à moi avec ce sac Kelly de sa belle-mère, elle me l'a offert  et on me donne de la même manière du ruban cela donne un mélange que je ne maîtrise pas complètement.

 

Le rêve de Noémie dans 10 ans ?
Continuer à m'amuser et à être moi-même et partager toujours mon travail, je vais avoir la chance de faire deux expositions pour la première fois de ma vie, Une à Hong Kong et l'autre à Paris au mois de Février 2020 et j'espère continuer de montrer mon travail, toujours être surprise parce-que je découvre que je suis capable de faire sans le savoir avant.

 

L'œil de Noémie sur la mode actuelle ?
Elle est un baromètre de l'air du temps et son rôle est un rôle de haut-parleur des évolutions de notre société, on le voit par cette richesse des lignes et des courbes des matériaux, ce mélange de la technologie et de l'artisanat pour obtenir des pièces uniques de plus en plus audacieuses.

 

Avez-vous des artistes peintres que vous préférez ?
Je suis très touchée par le surréalisme et le pop part. Ce sont les deux courants qui m'ont le plus influencé, on peut citer bien entendu Andy Warhol ou René Magritte qui sont les premières personnes qui ont provoquées chez moi les émotions artistiques, actuellement je suis très touchée par la démarche d'Annelle  qui n'hésite pas a investigué a touché à tout et qui met énormément de passion et d'énergie, je découvre sans cesse de nouveaux artistes qui m'ouvrent l'esprit et me conforte dans l'idée que ce monde est infini.

Infos pratiques :
Les oeuvres et le travail de Nochapiq sont à découvrir :
du 12 décembre 2019 au 15 janvier 2020 à Hong Kong dans le magasin Joyce de Harbour City
du 24 février au 7 mars 2020 à la Joyce Galerie  9 rue de Valois 75001 Paris

 

Par fashions-addict.com

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